
Abstraction faite aux sociétés des personnes dans cette présente note, la loi n°2015-032 portant code de commerce et ses textes modificatifs ont prévu d’autres formes sociétales notamment la société à responsabilité limitée (SARL), la société anonyme (SA) et la société anonyme simplifiée (SAS).
Ces diverses formes juridiques pouvant être regroupées sous l’expression sociétés de capitaux obéissent en ce qui concerne leur constitution des formalités propres à chacune d’elles. Ainsi, le recours chez le notaire pour la SARL est facultatif alors que la SA et la SAS doivent être rédigées sous forme authentique (article 205 du code de commerce).
La désignation d’un commissaire aux comptes est en principe optionnelle or qu’elle est requise dans la SA et la SAS.
Au-delà des particularités propres à chaque type de sociétés, beaucoup des sociétés surtout anonymes sont en apparence formelle alors que les formalités requises pour leur constitution ne sont pas observées. Il en est ainsi des cas que j’ai personnellement rencontrés dans ma vie professionnelle notamment :
- Cas d’une SA constituée par un actionnaire unique mais dont le minimum trois (03) administrateurs requis pour le conseil d’administration (article 422 code de commerce) n’est pas respecté ;
- Et chaque administrateur doit détenir des actions dites de garanties dont le montant ou le pourcentage est laissé au libre choix des actionnaires dans les statuts (article 427 du code de commerce). A titre d’information, ce nombre minimum de trois (03) administrateurs est porté à sept (07) pour les établissements de crédit (articles 48 de la loi bancaire et 12 de l’instruction de la BCM n°01/GR/2022 relative à la gouvernance au sein de banques) et l’exigence légale des actions de garanties prévue pour les administrateurs de la SA n’est pas applicable à ceux des établissements de crédit (article 51 al.2 de la loi bancaire).
- Cas d’une SA constituée sans la désignation du Commissaire aux comptes ;
- Cas d’une valeur nominale d’une part sociale ou d’une action inférieure à 500 MRU (cinq cent Ouguiyas) or le minimum est de 500 MRU et ce quand bien même qu’aucun capital minimal légal n’est requis pour la SARL.
Il est bien de savoir également, exception faite aux banques et aux sociétés d’assurance dont le capital social est respectivement de 1.000 000 000 MRU (article 2 de l’instruction BCM n°01/GR/2018 relative au capital et aux règles de calcul des fonds propres nets des établissements de crédit) et 30 000 000 MRU (article 216 (nouveau) de l’ordonnance n°2007/026 abrogeant, remplaçant et modifiant certaines dispositions de la loi n°93/040 portant Code des assurances), que le capital social minimal d’une SA est fixé 500 000 MRU ;
- Cas d’une SAS créée par deux personnes physiques alors que la création d’une telle forme juridique obéit à deux conditions qui, malheureusement ne sont pas respectées à savoir qu’une SAS ne peut être créée que par des personnes morales et celles-ci doivent se disposer d’un capital minimum de 2 000 000 MRU (deux millions d’Ouguiyas) ou la contrevaleur de ce montant en monnaie étrangère (articles 575 et 576 du code de commerce).
En pratique, ces omissions ou irrégularités échappent à la fois inconsciemment ou pas en amont au contrôle du Notaire en charge du dossier de création et en aval celui du Greffier en charge de l’immatriculation des sociétés. Dans tous les cas, le problème d’incompétence ou de sabotage des notaires et des greffiers se pose. Les premiers, en considération du caractère authentique et exécutoire attaché aux actes établis par eux, doivent comprendre que leurs actes ne sont pas exempts d’annulation ou de régularisation s’il s’avère qu’une formalité requise a été omise ou n’a pas été légalement accomplie.
Les seconds à savoir les greffiers, ils doivent se disposer des compétences nécessaires leur permettant d’assurer un contrôle efficace pour déceler tout manquement à la législation en vigueur.
En conséquence de ce qui précède, je recommande fortement aux commerciaux des banques en charge d’ouvertures de comptes pour leur clientèle entreprise et à mes confrères juristes de banques de faire preuve de vigilance. Il arrive que la société ait accompli les formalités administratives requises (registre de commerce, NIF…) pour sa constitution alors qu’au fond certaines irrégularités ci-dessus constatées n’ont pas été respectées.
Outre l’obligation de vérification, la conduite à tenir en pareille situation est celle prévue par les dispositions de l’article 204 al.2 du code de commerce qui stipulent « Si les statuts ne contiennent pas toutes les énonciations exigées par la loi et les règlements ou si une formalité prescrite par ceux-ci pour la constitution de la société a été omise ou irrégulièrement accomplie, tout intéressé est recevable à demander en justice que soit ordonnée, sous astreinte, la régularisation de la constitution. Le ministère public est habileté à agir aux mêmes fins ». Cette action se prescrit par trois (03) ans à compter de l’immatriculation de la société. Des dispositions semblables sont également prévues par l’article 925.4 du le Code des Obligations et des Contrats.
Me. BA Mamadou Tenguella
Conseiller juridique à la BFI et Consultant

